Du pétrole dans notre alimentation ? Ce que cache l’hexane…

Un rapport de Greenpeace publié en septembre 2025 nous rappelle (s’il était nécessaire…) que la santé des consommateurs n’est pas la priorité de l’industrie agroalimentaire.

Cet énième alerte sanitaire concerne l’hexane, un solvant pétrochimique utilisé pour maximiser le rendement des huiles végétales raffinées : huile de tournesol, colza, soja…

Vous allez découvrir comment des résidus de ce solvant dérivé du pétrole, entrainent une contamination invisible de notre alimentation : non seulement dans les huiles, mais aussi dans le beurre, le poulet, ou le lait infantile…

Qu’est-ce que l’hexane ?

Comment est fabriqué une huile végétale ?

L’huile est extraite des graines par pression mécanique. Cela permet d’extraire une grande partie de l’huile, environ 85%. La pâte sèche restante est appelé tourteau.

Pour augmenter le rendement et récupérer les derniers pourcentages d’huile dans le tourteau, de nombreux industriels utilisent une extraction par solvant, via ce fameux hexane.

Ce solvant chimique permet de dissoudre l’huile résiduelle du tourteau. Ensuite, le mélange est chauffé pour faire évaporer l’hexane. Diverses opérations chimiques de raffinage et de nettoyage permettent au final, de récupérer une huile « pure ». En théorie seulement… Car des résidus d’hexane, en dessous des limites règlementaires, subsistent dans le produit fini.

A noter que ce procédé chimique est strictement interdit dans l’agriculture biologique. Sachez aussi que les huiles « vierges » ou « pressées à froid » sont produites uniquement par pression mécanique, sans extraction par l’hexane.

Quels sont les risques pour la santé de l’hexane ?

Comme beaucoup de substances chimiques, le danger augmente avec la dose. Pour les travailleurs qui inhalent ce solvant régulièrement, l’hexane est toxique pour les neurones et les organes reproducteurs. Son lien avec le développement de maladies dégénératives comme la maladie de Parkinson est en cours d’investigation.

Un collectif de médecin et scientifiques a publié une alerte à ce sujet.1

Evidemment, les doses retrouvées dans les aliments sont résiduelles, mais la question de l’inocuité totale d’une telle substance se pose. Surtout en cas d’ingestion chronique et répétée, comme c’est le cas avec l’alimentation.

Le principe de précaution prévaut. En particulier pour les enfants et les femmes enceintes.

Pourquoi la contamination va bien au-delà de l’huile

Revenons au process de fabrication de l’huile.

Si on retrouve l’hexane dans le produit final, on le retrouve également dans le tourteau, la pâte restante.

Et dans l’industrie alimentaire, rien ne se perd tout se transforme.

Riche en protéines, les tourteaux sont utilisés…pour nourrir les animaux.

Pour vous donner une idée de l’importance de cette filière :

  • En France, sur les 6,3 millions de tonnes de graines triturées par l’industrie des huiles végétales, 57% est destiné à l’alimentation animale : bovins, vaches, porcs, volailles…
  • Les tourteaux sont la deuxième source alimentaire pour les élevages, après les céréales.
  • 90% des tourteaux produits en France sont extraits à l’hexane

Si le bétail est nourri avec des tourteaux contaminés à l’hexane, on comprend aisément comment ce polluant se retrouve in fine dans notre assiette.

A noter que l’utilisation de tourteaux extraits à l’hexane pour nourrir les bêtes, est interdite dans l’agriculture biologique.

Quels sont les produits contaminés ?

Parmi les 56 produits testés par Greenpeace (les marques les plus consommées par les français), 36 contenaient de l’hexane : huiles végétales, beurre, laits infantiles, et viande de poulet.

A noter que les 4 références d’oeufs testées sont négatives. Mais cela ne veut pas dire que d’autres échantillons de la même référence, ou que d’autres références d’oeufs, n’en contiennent pas.

Echantillon de produits testés et contenant des résidus d’hexane

Comme 90 % des tourteaux en France sont produits dans des usines ayant recours à l’hexane, tout comme ceux qui sont importés ; on peut facilement élargir une potentielle contamination (bien que non testés dans le rapport) dans tous les produits industriels utilisant de l’huile raffinée, c’est à dire :

  • Plats et soupes préparées
  • Biscuits, gâteaux, viennoiseries
  • Mayonnaise et toute sauce/vinaigrette à base d’huile
  • Chips, snacks salés
  • Céréales du petit déjeuner
  • Chocolats et confiseries
  • tous les produits comprenant du beurre de cacao, de la margarine, des lécithines, des germes de blé non bio …
  • tous les produits transformés végétariens avec des protéines de soja non bio

Une règlementation permissive

L’hexane n’est pas mentionné sur les étiquettes car :

  • Pour les huiles végétales : la concentration d’hexane mesurée est inférieure au seuil légal de 1 mg/kg
  • Pour les produits d’origine animale : car il n’existe aucune règlementation à ce jour

Le problème ? Ce seuil légal date de 1996. Il a été élaboré sur la base d’études anciennes, dont certaines financées par les lobbys industriels. En 2024, l’EFSA (Autorité européenne de sécurité des aliments) a estimé que ces données ne sont plus suffisantes pour garantir la sécurité sanitaire de l’hexane.

Par ailleurs, trouvez-vous cela normal que le consommateur ignore qu’un solvant pétrochimique soit utilisé dans la production de son huile de table ? Si cela figurait sur l’emballage, nul doute que cela affecterait les ventes…

Changer les règles du jeu

Greenpeace appelle à :

  • Obligation de mentionner la présence d’hexane sur les étiquettes
  • Interdiction progressive de l’hexane dans l’alimentation, en raison du risque sanitaire

Mais la responsabilité ne repose pas uniquement sur les pouvoirs publics ou les industriels… car comme disait Coluche « ‘il suffirait que les gens n’achètent plus pour que ça ne se vende pas ! »

Et maintenant, on fait quoi ?

En tant que consommateurs, nous avons des moyens concrets pour limiter notre exposition à l’hexane :

  • favoriser les huiles vierges ou pressées à froid
  • favoriser les labels bio
  • boycotter les huiles raffinées et les produits ultra-transformés

Cet énième scandale met en lumière une vérité essentielle : manger sainement ne se résume pas à compter des calories ou des nutriments (comme le met souvent en avant l’industrie sur ses produits), mais aussi de s’informer sur la qualité de ce que nous mangeons.

En conclusion, le message est toujours le même : mangez le plus de produits bruts, non transformés, et bio.

Références

1 : https://www.lemonde.fr/idees/article/2025/10/07/utilisation-de-l-hexane-par-l-agroalimentaire-un-produit-ne-doit-etre-autorise-que-si-les-avantages-sont-superieurs-aux-risques-pour-la-sante-publique-ce-n-est-pas-le-cas-ici_6644953_3232.html

Rapport de Greenpeace « Nos aliments contaminés à l’hexane », publié en septembre 2025

Pour aller plus loin :

Rapport toxicologique de l’hexane, publié par l’ANSES en 2014

Livre De l’essence dans nos assiettes – Enquête sur un secret bien huilé de Guillaume Coudray publié en septembre 2025

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