Contradictions en nutrition : comment y voir plus clair

Vous est-il déjà arrivé de lire un article qui vante les bienfaits de tel aliment, et de découvrir quelques jours plus tard qu’il est en réalité mauvais pour la santé ? 

Un jour, une étude vante les bienfaits du café pour la santé cardiovasculaire. Le lendemain, une autre alerte sur les effets négatifs d’une consommation excessive. Et que dire des produits laitiers ? Tantôt champions du calcium pour nos os, tantôt accusés de favoriser l’inflammation.

Contradictions et confusions : bienvenue dans la jungle nutritionnelle.

Dès lors, comment avoir les idées claires dans ce brouillard d’informations ? Qui sont les responsables de cette confusion ?

  1. Il y’a d’abord les études scientifiques, qui effectivement, semblent dire tout et son contraire.
  2. Puis les médias, qui ajoutent une belle dose de confusion en relayant, amplifiant, déformant ces études
  3. Enfin, toutes les entités motivées par un intérêt financier, commercial ou politique : l’industrie agro-alimentaire ; les vendeurs de régimes, de compléments alimentaires ou de pilules miracles ; les experts auto-proclamés et les « influenceurs » ; et même certains professionnels de santé soumis à des conflits d’intérêts.

Nous développerons dans cet article les points 1 et 2, ainsi que des pistes de solutions.

Le point 3 fera l’objet d’un article dédié.

1. La vérité choquante sur les études scientifiques

Préparez-vous, je vais vous retourner le cerveau. Etes-vous prêts ?

La majorité des études en nutrition ne valent rien.

En effet, elles ne valent rien. Que dalle. Que tchi.

Pourquoi ? Car elles sont en majorité observationnelles. Laissez-moi vous expliquez comme ça marche.

On observe les habitudes alimentaires de Bob et ses amis. Le plus souvent, les participants répondent à un simple questionnaire. Puis, on fait un lien entre ces données et un paramètre de santé mesurable (le poids par exemple), ou la survenue d’une maladie.

Le gros problème ? On omet totalement tous les autres facteurs de confusion qui peuvent interférer : l’activité physique, la qualité du sommeil, le niveau de stress, le mode de vie, le statut social, les différences génétiques entre chaque individu, est-ce que Bob vit à coté d’une usine polluante, est-ce que Bob est heureux à son travail, les variables sont potentiellement infinies…

Reprenons notre exemple. Nous pouvons mettre en évidence que ceux qui mangent plus de 2 carrés de chocolat par jour, prennent plus de poids que les autres. Mais cela ne signifie PAS que le chocolat cause directement le gain de poids. Vous comprenez la nuance ? Elle est fondamentale.

Ce genre d’études ne prouve en AUCUN CAS un lien de cause à effet. Elles montrent une simple corrélation statistique.

C’est pourquoi vous avez l’impression que toutes les études se contredisent. Un jour la viande rouge diminue le risque d’Alzheimer, puis le lendemain elle est cancérigène. Des chiffres et des données peuvent être interprétées de mille façons. Voire même manipulées selon les intentions de chacun…

Certaines corrélations statistiques observées dans les années 70-80 ont été propagées à grande échelle et perdurent toujours. Elle continuent d’influencer nos croyances alimentaires, à tort :

  1. Manger des oeufs, ça fait monter le cholestérol
  2. Les graisses bouchent les artères
    • Les études scientifiques n’étaient pas aussi robustes et rigoureuses qu’aujourd’hui. L’industrie agro-alimentaire a largement contribué à ces idées reçues en influençant les recommandations publiques et en s’enrichissant via des produits « 0% de gras ».

Il existe également des études biaisées par un conflit d’intérêt, économique ou idéologique. Pensez-vous qu’une étude qui relativise les dangers du sucre puisse être réellement fiable, si je vous dis qu’elle est financée par…Kellog’s ou Coca-Cola ?

Evidemment, tout n’est pas à jeter à la poubelle, loin de là ! Il est évident que de nombreux facteurs clés, régulièrement confirmés par des études rigoureuses et sur de très larges panel d’humains, ont une influence capitale sur la santé !

A retenir :
Tout ce qui est « scientifiquement prouvé » n’est pas forcément vrai.
✓ Le contexte d’une étude est indispensable pour interpréter correctement son résultat.
 Ne prenez pas les « Selon une étude… » pour des vérités absolues mais plutôt comme des pistes à explorer (ou pas).

2. Comment les médias contribuent à la désinformation

D’abord, sachez que le but d’un média, c’est de capter votre attention. Et pour cela, quoi de mieux qu’un titre qui choquesurprend, ou même effraie ?

« Les graisses saturées : un tueur silencieux ! » sera bien plus attractif que « Effets métaboliques des acides gras saturés ».

Les titres sont volontairement réfléchis pour attirer des clics.

Et le contenu ? Les études scientifiques sont complexes. Elles sont donc résumées de manière à les rendre plus digestes pour le grand public. Mais si les résultats sont sortis de leur contexte, exagérés, ou simplifiés à l’excès, on peut très arriver à la désinformation. C’est malheureusement ce qui se passe souvent.

Exemple n°1

Des études animales ont parfois montré un lien entre consommation élevée de sucre et développement de certains types de cancers.

Un média titrera alors : « Le sucre provoque le cancer. »

Chez l’Homme, la relation entre sucre et cancer n’a pas été démontrée directement.
La réalité, plus nuancée, serait plutôt : « Une consommation excessive de sucre peut contribuer à l’obésité et à l’inflammation, qui sont des facteurs de risque pour certains types de cancer. »

Exemple n°2 : voici un autre cas…

Des chercheurs suédois ont montré comment la présence naturelle de phyto-oestrogènes dans le café pouvait affecter la régulation hormonale des oestrogènes, chez certaines femmes (uniquement celles qui sont porteuses d’un certain variant génétique du CYP1A2, une enzyme impliquée dans le métabolisme des oestrogènes) (Lien vers l’article)

Et voici comment cette étude a été relayée dans la presse :

Sans commentaire.

A retenir :
✓ Les médias utilisent des titres simplistes et sensationnalistes
✓ Cela pousse les gens à adopter une vision binaire de l’alimentation (bons ou mauvais aliments)
✓ Cela a des conséquences négatives sur la compréhension de l’alimentation par le grand public.

Vous comprenez maintenant pourquoi vous vous sentez perdus.

Alors, on fait quoi ?

Situation n°1 : Le surplus d’information crée trop de confusion pour moi

À force d’entendre tout et son contraire, vous vous sentez perdus, frustrés. Ou encore pire : cela vous pousse à abandonner l’idée de manger sainement. Et puis de toute façon, « il faut bien mourir de quelque chose hein ».

Mon conseil sera alors radical :
– ignorez les études nutritionnelles. A priori vous n’êtes pas en train de rédiger une thèse en nutrition.
– ignorez tous les articles qui classent les aliments/nutriments en « bons » ou « mauvais ».
– plutôt que de lire chaque nouvelle étude, revenez à des principes simples pour adopter une relation apaisée avec l’alimentation : mangez des vrais aliments, mangez varié, et des aliments non transformés. (Cliquez ici pour lire mon article à ce sujet).

Situation n°2 : Je suis curieux et je souhaite m’informer sur les études

C’est une démarche louable. Mais cela vous prendra beaucoup de temps !

Une bonne compréhension de la science est nécessaire. Il faudra :

  • que vous lisiez l’étude en entier (qui sont souvent payantes…)
  • que vous analysiez le type d’étude (est-ce une étude observationnelle, ou un essai clinique randomisé bien mené..)
  • que vous analysiez tout le contexte : taille de l’échantillon, profil des participants, durée de l’étude, résultats confirmés ou non par d’autres études, éventuels conflits d’intérêt…

A vous de décider si le jeu en vaut la chandelle.

Mais à priori, votre objectif est plutôt de savoir manger sainement, en y prenant du plaisir, et sans y passer trop de temps, non ?

De temps en temps, je pourrais vous proposer des résumés clairs et objectifs des dernières recherches nutritionnelles. Si cela vous intéresse, faites-le moi savoir en commentaire !

Conclusion

Loin de moi l’idée de rejeter la science. La science est fondamentale pour comprendre la nutrition. La nutrition EST une science. Qui dit science, dit démarche raisonnée.

A travers cet article, mon objectif était :

1. vous faire comprendre qu’il est normal d’être confus dans cet océan d’informations, et que ce n’est pas de votre faute.

2. vous expliquer pourquoi il ne faut céder aux sirènes de la « dernière étude », aux titres alarmistes, et autres conclusions simplistes

Face à cela, scepticisme, esprit critique et pragmatisme sont les maîtres mots !

A suivre.

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