La résistance à l’insuline est un trouble métabolique insidieux, largement méconnu. Pourquoi ai-je décidé d’en faire un article ? Car la résistance à l’insuline prépare le terrain à de nombreuses maladies : stéatose hépatique (foie gras), diabète de type 2, hypertension, syndrome des ovaires polykystiques (SOPK)…
Souvent perçue comme un problème lié à la surconsommation de sucre, l’insulinorésistance est en réalité le reflet d’un dérèglement plus global du métabolisme – directement influencé par nos habitudes alimentaires et notre mode de vie.
Fatigue après les repas, fringales fréquentes, prise de poids, hypertension, troubles hormonaux… et si c’était un problème d’insuline ?
Dans cet article, nous allons voir comment la résistance à l’insuline se met en place, comment la dépister, et surtout comment la prévenir, ou l’inverser.
1. Quel est le rôle de l’insuline ?
Avant toute chose, quelques notions de jargon médical : glycémie veut simplement dire concentration de glucose dans le sang (exprimée en g/L). De la même façon, l’insulinémie est la concentration sanguine d’insuline. Hyperglycémie = glycémie trop élevée, hypoglycémie = glycémie trop basse.
Voyons maintenant quelques bases indispensables de fonctionnement du corps.
Le glucose est une source d’énergie vitale pour notre organisme, le cerveau et les muscles en sont les principaux consommateurs.
Le glucose présent dans notre sang provient principalement de ce que l’on mange. Tous les glucides que nous consommons (céréales, fruits, légumes, produits sucrés…) sont transformés en glucose dans l’intestin, qui passe ensuite dans la circulation sanguine.
Seule une partie du glucose doit rester dans le sang. Parce que la finalité du glucose est de rentrer dans les cellules : soit pour être utilisé en énergie ; soit pour être stocké sous forme de réserve (foie, muscles, tissu adipeux).
La mission de faire rentrer le glucose dans les cellules est assurée par l’insuline, une hormone sécrétée par le pancréas, petite glande derrière l’estomac. L’insuline est produite à une concentration proportionnelle à l’hyperglycémie détectée, comme c’est le cas après un repas.
Pour exercer son rôle correctement, l’insuline se fixe sur ses récepteurs qui sont situés à la surface des cellules.
Quand la clé (l’insuline) tourne facilement dans la serrure (son récepteur), alors la porte de la cellule s’ouvre et le glucose rentre.
Ça, c’est quand tout fonctionne correctement.
2. Qu’est-ce que la résistance à l’insuline ?
Maintenant imaginez que la serrure est rouillée, abimée…la clé a du mal à ouvrir la porte de la cellule.
La résistance à l’insuline est un dérèglement métabolique où les cellules de l’organisme ne répondent plus aussi efficacement au message de l’insuline.
En conséquence :
- Le glucose ne rentre plus aussi efficacement dans les cellules
- Et pour compenser, le pancréas produit davantage d’insuline pour tenter de faire rentrer le glucose. Par ce biais, la glycémie se maintient à des concentrations normales. Mais au prix d’une surcharge de travail du pancréas.
Si la résistance à l’insuline persiste et qu’aucune mesure n’est prise, cette surproduction continue d’insuline épuise peu à peu le pancréas. Au fil des années, la résistance à l’insuline s’accentue. Le sucre a de plus en plus de mal à rentrer dans les cellules, la glycémie à jeun augmente.
Quand elle dépasse 1,10 g/L, on parle de pré-diabète.
Quand la glycémie à jeun dépasse 1,26 g/L, c’est le stade final de la résistance prolongée à l’insuline. Maladie tristement célèbre sous le nom de « diabète de type 2 » et qui touche 537 millions de personnes dans le monde.
3. Pourquoi la résistance à l’insuline est-elle un problème de santé majeur ?
Les dangers du diabète sont bien connus et sont dus, entre autres, à la toxicité de l’excès de glucose sur les parois des vaisseaux sanguins : insuffisance rénale, risque cardiovasculaire, baisse de la vue, ou encore perte de sensibilité au niveau des nerfs.
A l’inverse, les effets de l’hyperinsulinémie chronique, conséquence compensatoire de la résistance à l’insuline, sont largement ignorés. Et ce, au sein même de la communauté médicale.
Les conséquences principales sont :
- L’insuline favorise la prise de poids et l’obésité abdominale, en stimulant le stockage des graisses.
- L’insuline favorise par conséquent la stéatose hépatique (foie gras)
- L’insuline augmente la rétention de sodium et contribue à l’hypertension
- L’excès d’insuline favorise un état inflammatoire chronique et donc le vieillissement des cellules, via l’activation de messagers (cytokines) pro-inflammatoires et via les effets cités ci-dessus.
- Chez la femme, l’insuline stimule les ovaires à produire plus d’androgènes, les hormones sexuelles masculines (testostérone). Ce mécanisme perturbe le cycle menstruel et peut entraîner des effets « masculinisants ». Ce déséquilibre hormonal est un facteur clé du syndrome des ovaires polykystiques (SOPK).
4. Les signes d’une résistance à l’insuline
Dans la majorité des cas, la résistance à l’insuline est silencieuse.
Parfois, certains indices, pas du tout spécifiques, peuvent nous mettre la puce à l’oreille : fatigue persistante, prise de poids abdominale, faims fréquentes, fringales sucrées, Peau foncée au niveau du cou ou des aisselles (acanthosis nigricans), hypertension, troubles du sommeil…
5. Quelles sont les causes de la résistance à l’insuline ?
Nous ne naissons pas avec les mêmes cartes en main et il existe bien évidemment des prédispositions génétiques propres à chaque individu.
Cela étant dit, de nombreux facteurs extérieurs sont impliqués dans la résistance à l’insuline. Leur point commun à tous ? Ils illustrent notre mode de vie moderne :
- Consommation excessive d’aliments à charge glycémique élevée
- Consommation excessive de fructose
- Manque d’activité physique
- Inflammation chronique
- Altération de la flore intestinale
6. Comment dépister une résistance à l’insuline ?
La glycémie seule ne suffit pas car elle ne permet pas de détecter une résistance à l’insuline.
Pourtant, je constate tous les jours dans ma pratique professionnelle qu’une grande majorité des bilans prescrits par les médecins ne comportent que la glycémie. Les recommandations actuelles de dépistage sont insuffisantes et ignorent l’insulinémie. On passe donc à côté de la face immergée de l’iceberg.
En effet, il est tout à fait possible d’avoir une glycémie normale, car compensée par une sécrétion élevée d’insuline. C’est d’ailleurs ce que l’on observe dans les premiers stades de la résistance à l’insuline.
Il faut donc coupler l’insulinémie à jeun et la glycémie à jeun. Ces 2 mesures évaluent la capacité de votre organisme à gérer le glucose. Les résultats sont exprimés sous forme d’un calcul, appelé « Indice de HOMA«
Interprétation : un index de HOMA supérieur à 2,5 est en faveur d’une résistance à l’insuline.
Tout bilan de prévention santé devrait inclure l’indice de HOMA. N’hésitez pas à le demander à votre médecin. Le dosage est possible sans ordonnance, et coûte environ 20 euros.
Identifier une résistance à l’insuline avant l’installation du diabète est crucial, puisque c’est à ce stade précoce que l’on peut agir efficacement pour l’inverser.
7. Combattre la résistance à l’insuline
Les 2 piliers essentiels pour prévenir la résistance à l’insuline sont l’exercice physique et l’alimentation (hé oui désolé pour l’originalité).
A. Une alimentation adaptée : le levier principal
Diminuer la résistance à l’insuline, ça passe par moins d’insuline. Et moins d’insuline, ça passe par moins de glucose. Voilà pourquoi l’alimentation est l’autre clé du problème. 
Cependant, toutes les sources de glucides ne sont pas égales et ont des impacts différents sur la sécrétion d’insuline (concepts de charge et index glycémique, que nous ne détaillerons pas ici).
A privilégier car charge de glucides faible ou nulle
- Tous les légumes (hors féculent)
- Légumineuses : haricots rouges, noirs, blancs, lentilles, pois chiches, pois cassés…
- Céréales complètes : quinoa, riz complet, riz basmati, orge, sarrasin, épeautre, millet…
- Fruits entiers, pas en jus
- Oléagineux : noix, noisettes..
- Protéines de qualité : poissons gras (saumon, maquereau, sardines…), viandes blanches (poulet, dinde…), oeufs, tofu, tempeh,
- Produits laitiers non sucrés : yaourt nature, fromages affinés…
- Boissons non sucrées : eau, thé, café sans sucre, tisanes…
A limiter car provoquent une forte élévation de la glycémie, et donc de l’insuline :
- Pain blanc, pain de mie, baguette classique, viennoiseries
- Pâtes blanches et riz blanc
- Pomme de terre
- Chips, crackers et tous les snacks salés industriels
- Céréales transformées du petit déjeuner, barres céréales industrielles
- Biscuits, gâteaux
- Sodas, jus de fruits
- Cocktails et boissons alcoolisées sucrées
B. Il faut bouger bouger
On a vu que l’insuline est la « clé » qui ouvre les portes des cellules pour que le glucose rentre.
MAIS il y’a une exception..
Les muscles sont capables, quand ils se contractent, de capter le glucose spontanément, sans intervention de l’insuline.
C’est pourquoi l’exercice physique est une « prescription » essentielle dans la prise en charge du diabète, et de la résistance à l’insuline.
Tout type d’activité physique active cette captation du glucose : footing, marche rapide, natation, vélo, rameur, danse, step, musculation, corde à sauter…
Conclusion
Un mal silencieux, mais des conséquences délétères. Voilà ce qu’est la résistance à l’insuline.
La bonne nouvelle, c’est qu’elle peut être prévenue et inversée grâce à des choix de vie simples : une alimentation adaptée, une activité physique régulière, mais aussi un sommeil de qualité et une gestion efficace du stress (que je n’ai pas développé ici).
Ne tardez pas à agir.
N’attendez pas de prendre du poids, de prendre du ventre, ou que votre tension augmente…
N’attendez pas non plus que l’on vous diagnostique un diabète ou une maladie chronique…
Ensemble, combattons la résistance à l’insuline !
